La Bulle Haute-Saône
Une scène gonflable spectaculaire

« Un gonflable, c’est simplement une peau qui contient un espace, sépare extérieur et intérieur, apparaît et disparaît et parfois se dématérialise. En cela, c’est un espace ludique, fantastique et inhabituel, très loin de la construction traditionnelle. » Hans-Walter Müller

« Cette réalisation doit favoriser l’émergence de projets artistiques en prise directe avec les besoins de la population, comme avec celles des artistes désireux de trouver de nouveaux espaces d’expression. »
Jean-Pierre Michel, Président de l’Addim 70, Sénateur de la Haute-Saône et Conseiller général

La Bulle, scène gonflable itinérante, Pôle d’excellence rurale, est une création de l’architecte scénographe Hans-Walter Müller et de l’agence Scèn&Act, réalisée avec le soutien financier de l’Europe (FEDER), de l’Etat (FNADT) et du Conseil général de la Haute-Saône.

Le rôle SCEN&ACT, en charge du projet, a été de concevoir un outil adapté à la représentation de spectacles dans l’espace public. Pendant des siècles, les scènes de théâtre ont parcouru les routes, et les comédiens, dans une France essentiellement rurale, jouaient souvent sur scène montée rapidement, voire sur leurs calèches. La Bulle obéit aux mêmes principes de pragmatisme (aller à la rencontre du public, allier esthétisme et budget raisonné). Scen&Act a opté pour le travail de Hans-Walter Müller à l’origine des « gonflables », architectures d’air légères, nomades et aisées à installer. Un esprit qui rappelle par certains côtés l’utopie du nomade portant sa maison sur son dos, ouvert au voyage et à la découverte.

D’une superficie totale de 293 m2, haute de 9 m, la Bulle peut accueillir 160 spectateurs assis, 200 debout, et intègre une scène de 42 m2 avec grill et lumières.

Un équipement économique

La Bulle, avec son éclairage à base de LEDs, consomme en outre beaucoup moins d’énergie que les lumières traditionnelles tout en proposant un habillage lumineux à la hauteur au niveau esthétique. La légèreté de ces éclairages et de leur structure porteuse en font un dispositif très commode pour les déplacements à travers la Haute-Saône.

Mais la Bulle est avant tout un lieu vide et neutre. Charge aux artistes divers de lui donner vie en y apportant leurs univers.

Une approche conceptuelle inédite

Cet équipement scénique mobile à géométrie variable résulte d’une approche conceptuelle et scénographique inédite.

Conçu pour être facilement transporté et installé, la Bulle doit permettre à l’Addim 70 et ses partenaires de porter un projet artistique et culturel fort au bénéfice des populations vivant dans des zones dépourvues de lieux scéniques dédiés.

Objet symbolique et inédit, la Bulle s’inscrit dans une conception résolument novatrice en matière de développement culturel : inscrire l’éphémère dans le durable, en s’attachant non plus à la matérialité (l’équipement proprement dit) mais davantage à l’implication des acteurs.

Le développement local repose ainsi plus sur la valorisation des ressources informelles qualitatives que sur l’existence a priori d’infrastructures, d’équipement, de ressources matérielles.

Dès l’automne 2009, l’Addim 70 s’attachera ainsi à développer à partir de cet équipement, des actions de sensibilisation, de formation et de diffusion en collaboration étroite avec plusieurs communautés de communes associées.

Le concept sur lequel repose cet équipement innovant et performant permet, par l’emploi de formes et de matières spécifiques, d’installer cet espace culturel dans un laps de temps bref et dans des conditions aussi diverses que les sites destinés à l’accueillir.

Le volume développé à partir d’un plan hexagonal, expérimenté dans d’autres projets de Hans Walter Müller, offre des qualités acoustiques particulièrement adaptées au spectacle vivant, et notamment musical.
Sa structure belle et originale s’inscrit dans le paysage qu’elle contribue à enrichir.

La Bulle offre ainsi souplesse et beauté. Modulaire dans son agencement, elle constitue par sa présence au cœur des espaces ruraux un signal moderne et attrayant.

3 questions à Benoît Colardelle de SCEN&ACT

La Bulle, c’est quoi ?

Nous avons vocation, au sein de SCEN&ACT, à imaginer des outils adaptés à une problématique particulière, souvent originaux par nécessité, qui puissent répondre à la question de l’aménagement du spectacle dans l’espace public.

Répondre à la demande d’un théâtre itinérant relevait pour nous d’un triple défi : trouver une forme générale séduisante et appropriée, élaborer les solutions techniques les plus efficaces ... et demeurer dans le cadre d’un budget raisonnable.

Nous nous sommes assez vite orientés vers un espace gonflable, en nous appuyant sur le travail de Hans-Walter Müller, qui cristallisait l’ensemble des qualités que nous recherchions pour le "chapiteau" : une forme esthétique et originale, qui puisse à la fois s’inscrire harmonieusement dans le paysage et offrir de réels avantages en termes de montage, de démontage et de transport.

Notre rencontre nous a confortés dans notre volonté de travailler avec Hans-Walter Müller. Sa longue expérience en matière d’espaces modulaires et spectaculaires et sa constante volonté d’innover, tant aux plans technique qu’esthétique, correspondent parfaitement à ce que nous désirons mettre en œuvre au sein de Scèn&Act.

Quelles en sont les autres innovations, du point de vue technique notamment ?

Les deux principales innovations techniques, caractéristiques de l’aménagement de la Bulle Haute-Saône, sont le grill et les lumières

La lumière tient une part essentielle dans la scénographie d’une salle de spectacle. L’éclairage par LEDs, sur lequel nous travaillons depuis plusieurs années et qui, très littéralement, révolutionne la lumière, nous a paru parfaitement adapté à la Bulle Haute-Saône : la légèreté des projecteurs, leur faible consommation d’énergie alliée à une durée de vie considérable et à une maintenance réduite a minima, ainsi que la modularité offerte aux éclairagistes constituent autant d’avantages dans la conception comme dans l’exploitation d’un théâtre itinérant.

Nous pouvions dès lors imaginer une structure nettement plus légère pour accrocher les projecteurs au-dessus de la scène. Deux mats supportent le grill au lieu des quatre habituels, conférant à la structure une légèreté esthétique et matérielle ainsi qu’un angle de vision nettement plus large pour le public. Un système de type gréement naval, à base de haubans et de vergues et éprouvé de longue date dans la marine, porte et maintient l’ensemble de la structure. Nous avons fait appel à Laurent Chevassus de Paris Voile pour concevoir un équipement original : un assemblage de barres aluminium en triangle qui rappel la scène et les gradins. Tout le dispositif a été conçu spécifiquement pour notre application.

La scénographie intérieure répond ainsi à l’espace gonflable, réalisé et conçu dans un même esprit d’innovation et de souci de l’efficacité de nos solutions.

Dans quelle mesure votre projet est-il issu d’une collaboration ?

Le principe collaboratif est inscrit dans le fonctionnement même de SCEN&ACT. Chacune des personnalités qui constituent l’équipe apporte des talents et compétences complémentaires. La scénographie répond à l’ingénierie, la technique à l’esthétique, l’acoustique à la vision...
Je fais en sorte de réunir, dés l’origine du projet et dans le cadre d’une réflexion globale, les talents nécessaires à une conception ambitieuse.

Chacun peut dès lors faire mûrir le projet, nous permettant du même coup d’y apporter les réponses les plus pertinentes.

Hans-Walter Müller, architecte scénographe

Hans Walter Müller est le véritable inventeur des « Gonflables », les architectures d’air à habiter. Depuis plus de trente ans, Hans Walter Müller, artiste ayant appartenu à la mouvance des années 60 de l’art cinétique, développe une architecture nomade, éphémère, légère et simple à installer : les gonflables. En 1971, l’architecte s’installe dans un de ses gonflables sur le site de l’aérodrome de Cerny dans la forêt de la Ferté Allais en Essonne. Au milieu des arbres, entourée de bassins remplis de plantes aquatiques et de poissons rares, la bulle jaune abrite des zones d’ateliers, des espaces de travail et de détente qui s’agencent sur des planches en bois coulissantes. Au sous-sol, creusée dans la roche, s’articulent les espaces domestiques et de repos qui ont la particularité de donner sur l’extérieur (terrasse, baies vitrées).

« Un gonflable » explique Hans-Walter Müller, « c’est simplement une peau qui contient un espace, sépare extérieur et intérieur, apparaît et disparaît et parfois se dématérialise. En cela, c’est un espace ludique, fantastique et inhabituel, très loin de la construction traditionnelle ».

Hans-Walter Müller a ainsi réalisé une centaine de gonflables pour divers événements, expositions, festivals, équipements culturels et pour des artistes tels que Jean Dubuffet, Salvador Dali ou Maurice Béjart…

Cet architecte aux idées très contemporaines de technologie douce et d’high-tech humanisé, a à son actif un espace de 200 places pesant 32 kg, un volume théâtre gonflable créé pour les JO de Barcelone, une descente des Champs-Elysées dans une bulle…

Un module de base de 120 cm rythme les constructions géométriques et sert de toise à la majorité des espaces conçus par Hans-Walter Müller.

3 questions à Hans-Walter Müller, architecte de l’air

En quoi votre conception des gonflables change-t-elle la notion de l’espace ?

Un espace gonflable est un lieu neutre, qui permet au spectacle de prendre toute sa place. Le spectateur n’est agressé en rien. Rien, dans l’espace qui accueille le spectacle, ne vient distraire son attention. Il peut dès lors se consacrer à 100% au spectacle.

C’est par ailleurs un lieu fonctionnel, sans prétention, qui permet de créer un espace sans séparation entre les artistes et le public et, du même coup, de conserver un lien direct entre ces derniers.

Par ailleurs, un gonflable est conçu dans l’idée selon laquelle tout esprit, toute forme peut s’y développer. Il n’y a pas de rupture entre le sol, les murs et le plafond, ni parasitage ni rupture d’aucune sorte.

Enfin c’est un lieu aérien, en rupture avec tout ce que nous connaissons, puisqu’en temps normal, tout le temps et partout, l’architecture est soumise par nature à la gravité. Dans toute construction en dur se pose la question de la pression exercée par le bâtiment lui-même sur sa structure sous-jacente, l’idée consistant à trouver le chemin le plus court et le plus efficace pour transmettre les forces exercées par la masse du bâtiment jusqu’au sol. D’où la nécessité de fondations solides, complexes et pesantes, capables d’absorber ce retour de forces.

Dans un gonflable, pas de fondations, pas de pesanteur, mais simplement la mécanique des fluides en action, une solution élégante et simplissime : l’air joue le rôle de fluide porteur et de climatiseur. Une surpression de quelques millibars seulement - entre un et trois - suffit à porter la structure, tout en amenant l’air ambiant à la température idéale. Cela correspond, pour vous donner une idée, à la pression ressentie lorsque vous plongez votre tête sous l’eau à 3 centimètres en dessous de la surface. 

Comment définiriez-vous votre métier ?

Je me considère comme un architecte-couturier, on pourrait dire que je construis des pantalons géants dans lesquels je vis. Je choisis ma matière comme le ferait un styliste et je l’assemble, en créant la forme. Je commence par tracer des gabarits, des patrons pourrait-on dire, à partir desquels je vais pouvoir découper des pans de toile qui seront ensuite assemblés par couture ou, mieux, par soudure thermoplastique.

Pour poursuivre l’analogie du stylisme, un vêtement bien coupé tombe naturellement et habille harmonieusement le corps qui le porte. Une couture mal ajustée, une courbe mal dessinée et ce qui devrait normalement correspondre à un magnifique vêtement devient subitement ordinaire, voire laid. De la même façon, si je me trompe dans le tracé, ou dans le découpage de mes gonflables, je vais me retrouver avec des plis disgracieux qui correspondent, au plan physique, aux endroits où la pression de l’air est inégale, à une rupture d’harmonie en quelque sorte.

Comment avez-vous intégré votre concept de gonflable au projet de la Bulle ?
Le principe du gonflable doit, à l’instar d’un chapiteau de cirque, provoquer un émerveillement...éphémère.
Il transforme un lieu naturel ou urbain en un lieu spectaculaire; un espace gonflable ne s’impose pas, mais il est disponible pour tous ceux qui veulent s’en approcher.

Un gonflable réunit la plupart des qualités caractéristiques de cet émerveillement éphémère : une fois plié, sa peau ne pèse que quelques dizaines de kilos, et pourrait sans difficulté tenir dans une petite malle; un gonflable est par nature dégonflable. Ce qui, quelques minutes plus tôt, occupait 300 m2 au sol et s’élevait à 10 mètres de hauteur peut, quelques minutes plus tard, disparaître et tenir dans une petite caisse.

Apparitions, disparitions, on se retrouve-là en plein dans l’univers du spectacle.

Ainsi, cette ergonomie naturelle du gonflable s’adaptait particulièrement bien à l’idée d’une salle de spectacle itinérante. Une structure légère, facilement transportable et aisée à mettre en œuvre, suffisamment extraordinaire pour susciter l’intérêt des habitants, et susceptible de s’installer sur un site en quelques heures, avant de reprendre son chemin en laissant le site intact.